Découvrir l'Indonésie: Sumba

Sumba



 
Sumba a longtemps été ignorée des circuits touristiques. Cette île située au sud de Flores et des iles de Rinca et Komodo n’est pourtant pas très éloignée d’autres îles plus touristiques comme Bali. Et pourtant elle  révèle des trésors à découvrir. Elle fait partie aussi des îles de la Sonde.



   1.  Pourquoi se rendre à Sumba ?

Quand on se rend à Sumba, c’est la recherche d’une île authentique riche de sa culture ancestrale, une nature inviolée, un parfum d’aventures qu’on vient chercher.
Il faut le savoir ce n’est pas non plus une île facile à explorer. La plupart des visiteurs la découvrent avec un guide et un itinéraire entièrement balisé ou alors ils viennent se poser dans le resort de luxe de Nihiwatu où on fait un peu un séjour hors sol (et hors de prix…). Si vous désirez faire un voyage autonome, il vous faudra si possible maitriser un peu de Bahasa car très peu parlent anglais, accepter d’être logé dans des conditions plus spartiates, manger des nourritures parfois un peu rustiques.
Par contre vous serez presque seul au monde avec une nature sauvage et au contact d’une culture étonnante, la culture du Marapu. Les maisons aux toits de chaume  s’élevant vers le ciel en sont les symboles et sont d’ailleurs un des éléments qui m’ont donné envie de venir ainsi que des informations sur le Marapu révélées sur certaines pratiques qui ont piqué mon imagination.
Les paysages sont le plus souvent des paysages de savane même si vous trouverez des forêts et des cascades et quelques rizières. Les plages sont superbes (et vous y êtes seuls) mais beaucoup d’entre elles sont plus faites pour les surfeurs que les snorkellers. Elles sont même parfois une peu dangereuses. Soyez prudents.



Pas de volcan ici, mais plutôt des collines.
Très vraisemblablement il y a des centaines de sites à découvrir et ceux que je vais vous conseiller ne sont qu’un petit aperçu de ce qu’il y a à explorer.
Il semble y avoir une volonté de développer cette île sur le plan touristique, des investisseurs prennent des photos des bords de mer, je vois de plus en plus de proposition d’agence pour Sumba. Des routes se construisent. Il risque d’y avoir du changement qui arrive, affaire à suivre.
Le cyclone Seruja en 2021, l’invasion de criquets pèlerins en 2022 et 2023 ainsi que la sécheresse que subit Sumba avec El Nino ont fait pas mal de dégâts en particulier à l’est du pays.


   2.  La culture

Ce sont les portugais qui ont colonisé l’île au 16^ème siècle puis les hollandais, l’île est donc très majoritairement chrétienne à 70%. Mais c’est la religion locale, le Marapu qui va vous marquer le plus. Pratiquée essentiellement à l’ouest de l’île, c’est une religion à base d’animisme. Vous reconnaitrez les villages où elle se pratique aux hauts toits pointus de chaume  et à ses tombeaux mégalithiques. Le dernier roi de Sumba est mort en 2017, je crois, mais la structure sociale est toujours organisée avec des nobles et des classes inférieures, parfois considérés comme esclaves. Je ne vais pas développer ici tous les aspects de cette religion mais elle mérite qu’on se renseigne sur elle avant de partir. La polygamie existe toujours.



Les Sumbanais sont plus pauvres qu’ailleurs, la malnutrition est largement répandue et il y a des problèmes sanitaires importants. Le covid a aggravé les difficultés qui étaient déjà présentes, même si il a peu touché les campagnes reculées.
Seuls 25 % des enfants finissent leur scolarité élémentaire. Il y a parfois des conflits entre les villages. Cette île est souvent un peu abandonnée des autorités de Java.
Les sumbanais sont ceci dit, plutôt sympathiques et accueillants mais parfois, quand vous êtes un peu éloignés au milieu de nulle part, les choses peuvent être un peu plus compliquées. Ne rentrez pas dans un village sans apporter des présents (des noix de bétel, du thé et du sucre peuvent faire l’affaire) et demander l’autorisation au chef du village, le Rato. Pour certains villages il faut même pour pouvoir entrer, lire dans les entrailles d’un poulet. Il peut y avoir parfois des phénomènes de mendicité. Attention au centre des villages car  il y a des pierres sacrées que vous ne reconnaitrez pas facilement, ne faites pas d’impair, ne touchez rien et demandez où vous pouvez passer. Il y a des arbres à tête dans certains villages qui attestent du passé anthropophage de l’île.
Le tissage de l’Ikat est un art très développé et l’Ikat sert aussi bien de vêtement que de cadeau de  valeur. Vous pourrez aussi admirer les magnifiques couteaux accrochés aux ceintures des hommes ainsi que leur turban en Ikat. Les femmes sont parfois tatouées.



Le cheval est un élément important de la culture à Sumba. Le festival du Pasola qui a lieu chaque année en février ou mars permet aux meilleurs cavaliers de s’affronter.
Il existe plusieurs cérémonies au fil de l’année autour des mariages, des enterrements ainsi que les Tarik Watu et Tongi Watu qui sont des cérémonies en relation avec la fabrication et le transport des pierres tombales. Y assister est souvent impressionnant et comme pour les enterrements des Torajas au Sulawesi, âmes sensibles s’abstenir.
A Sumba on se salue en se frottant le nez et en serrant les lèvres.



Le Bahasa est bien sur parlé, il existe 6 langues régionales regroupées dans 2 familles: le bahasa sumba et le bahasa daerah. Mais dans les endroits les plus reculés même le bahasa ne suffira pas. Et comme il y a peu d’infrastructures touristiques, il n’est pas facile de trouver des gens qui parlent anglais.
Bref vous l’avez compris c’est la culture qui est le plus gros atout de Sumba. C’est une île au charme brut, pas facile d’accès mais passionnante et elle vous laissera un souvenir puissant.


   3. Comment s’y rendre ?

En avion Il y a 2 aéroports à Sumba :

• Tambolaka au nord ouest via Denpasar (Bali) et Ende (Flores)
  
• Waingapu  au centre et au nord via Denpasar et Kupang (Timor)
  

Les deux compagnies sont Wings air (Lion air) et Sriwijaya (Citilink)

En bateau
C’est la compagnie Pelni qui assure la traversée toutes les 2 semaines dans les deux sens sur l'itinéraire Benoa – Bima – Waingapu – Ende – Savu – Rote – Kupang – Larantuka – Kalabahi. Un bateau de plus petite taille, le KM Wilis, dessert plus ou moins chaque semaine l'itinéraire suivant dans les deux sens : Batulicin – Makassar – Labuan Bajo – Waikelo – Waingapu – Ende – Kupang – Kalabahi.
Il y a aussi d’autres compagnies comme Sabuk Nusantara et ASDP Indonesia Ferry



   4.   Quand y aller, combien de temps rester ?

On l’a vu, Sumba a un climat semi aride. La meilleure saison pour visiter Sumba est de mars à juin ou d’octobre à novembre pour avoir la végétation encore à peu près verte. De juillet à septembre tout est très sec et la mer au sud peut être dangereuse (attention aux courants, j’ai failli en faire l’amère expérience).
On peut passer beaucoup de temps à explorer Sumba mais je dois dire qu’en tant que voyageurs indépendants; le voyage est intense et que n’ayant pas pris notre billet de retour, nous avons en fin de compte  jeté l’éponge au bout de 3 semaines. La difficulté de logement, la nourriture difficile d’accès et de faible qualité a eu raison de nous. En arrivant à Ende nous avons eu l’impression d’arriver dans un pays de cocagne… Tout va dépendre de vos conditions de voyage. J’en parle plus bas.


   5.    Se déplacer sur l’île

Il n’est pas facile de construire un itinéraire pour visiter Sumba. Les cartes n’existent pas vraiment, les noms changent.  Google fait un travail assez aléatoire mais reste indispensable pour ne pas se perdre (penser à télécharger les cartes avant). Le mieux est de télécharger la carte de Sumba information dont je vous donnerais le lien à la fin de ce post.
Il existe des bus mais nous n’avons pas réussi à en prendre à cause des difficultés de compréhension et de l’endroit où étaient situés nos logements. Le plus facile semble entre Waigapu, Waikabukak  puis Waitabula-Tambolaka. Les bus partent des marchés.
Il y a par contre de nombreux bemos (minibus), des taxis collectifs et des ojeks (moto-taxis). Sur certains endroits il y a aussi uniquement des camions ou des biskayu (bus en bois).
Il est possible de louer des scooters ou motos en s’adressant à son logeur. Attention les routes sont en mauvais état. Pensez à prendre le numéro de téléphone du propriétaire et vérifiez l’état de la moto. Soyez prudent et n’oubliez pas que si vous n’avez pas le permis moto sur un permis international, même si très vraisemblablement personne ne vous demandera rien, en cas de problème, vous ne serez pas couvert et cela peut devenir très problématique. A vos risques et périls. Dans plein d’endroits il vous faudra acheter de l’essence en bord de route.
En prenant un guide vous aurez souvent un chauffeur avec lui ou le guide lui-même conduira.




  6.     Se loger

C’est un des points le plus délicat de l’île selon moi. Il existe deux types de tourisme à Sumba :

• un tourisme balisé avec des logements réservés par le guide à chaque étape, parfois même un tourisme onéreux où les prix des logements sont très éloignés des revenus des habitants et sont aux mains d’investisseurs étrangers.
  
• Un tourisme autonome où il est beaucoup plus difficile de trouver un logement et quand on en trouve un, d’avoir un confort acceptable. La moins pire des solutions est de cibler les hôtels pour indonésiens en voyage d’affaire ou autre. Ce type d’hôtel désuet n’est pas idéal mais permet de se loger correctement quand même mais il y en a peu. Vous trouverez aussi quelques guesthouses mais pas partout. Il semblerait aussi que certains logements à prix plus contenus commencent à émerger,  affaire à suivre. On est même passé par coachsurfing mais on n’a jamais réussi à retrouver le gars qui nous avait donné rendez vous… Peu aussi de restaurants à l’offre variée. Un peu de riz mal trié, une patte de poulet (pas une cuisse hein    et voilà votre nasi dengan ayam goreng !  Je vous conseille de prendre une moustiquaire traitée, cela vous permettra de sauver quelques situations.
  

Plus de 3000 euros la nuit, ça vous dit?

  7.     Où aller, quoi visiter ?

Il existe plusieurs choses très chouettes à voir et à faire à Sumba. De notre coté nous avons surtout visité l’ouest de l’île car la partie culture Marapu nous intéressait fortement. Mais il semble y avoir aussi de très belles choses à faire à l’est.



Autour de Tambolaka-Waitabula

La petite ville ressemble à n’importe quelle ville indonésienne un peu endormie. Vous trouverez une belle plage de sable blanc à l’ouest du port mais attentions aux crocodiles près de l’estuaire qui rendent la baignade dangereuse. La présence de bugis dans ce coin vous permettra d’assister à la fabrication de bateaux. A l’est il y a d’autres villages agréables comme Katewela avec de belles plages et quelques resorts en poursuivant plus à l’est.  Il y a des villages Marapu plus au sud mais  franchement c’est hyper difficile de trouver sans guide. Nous avons essayé de nous rendre à l’un d’entre eux, Totok mais c’est là qu’il aurait fallu ouvrir les entrailles de poulet et bien sur prendre un guide.





Vers le sud ouest de l’île

C’est là que se concentre la religion Marapu et que vous trouverez les plus beaux villages et les tombes mégalithes.
Si vous poursuivez la coté vers l’ouest puis le sud, une nouvelle route occupe tout l’espace et rend la côte inaccessible mais en poursuivant plus loin on arrive à un endroit de baignade agréable mais fréquenté qui est une sorte de lagon : Danau Waikuri. En vous dirigeant vers lui depuis Waitabula vous pouvez musarder un peu et découvrir des villages Marapu. Si vous poursuivez plus au sud vous arriverez vers la région de Kodi où on dit que les traditions sont les plus vivaces mais aussi que les combats entre villages existent toujours.  
C’est là qu’on trouve le village emblématique de Ratenggaro mais attention il semblerait que l’accès en soit maintenant interdit suite à un meurtre et nous avions en effet trouvé l’ambiance un peu tendue. Vérifiez si cest toujours le cas. Si vous ne pouvez pas y aller vous trouverez dans cette région plein d’autres villages bien typés. Soyez toutefois prudents et respectueux, ils sont considérés comme des guerriers des plus redoutables dans le coin.











Waikabukak


C’est aussi un excellent endroit pour rayonner et s’imprégner de la culture Marapu. Pratiquement à Waikabukak même vous avez le Kampung ( kampung signifie village) Prai Ijing où habite la famille d’une guide très sympa, Julia.



Nous avons assisté à une cérémonie au milieu de nulle part et ce fut une expérience marquante car nous y étions seuls après un périple rocambolesque en ojek improvisé. Mais nous avons aussi fait appel à un guide pour découvrir un village très isolé où nous avons assisté à un rituel avant la chasse au sanglier à la lance et à la confection d’un de ces toits tout en hauteur. Mais aussi la fabrication des mégalithes et la découverte des tombes les plus emblématiques en particulier celle qui contient le dernier roi et peut être aussi des esclaves qui auraient accompagné le roi dans sa tombe… C’est une information qui nous vient d’un ethnologue indonésien rencontré à Kupang. Je vous dis que cette religion est fascinante et fait aussi un peu peur.












Andung, arbre (ou poteau de bois) supportant les crânes des ennemis autrefois capturés, l’andung commémore l’ancien temps de la chasse aux têtes et reste aujourd’hui un important lieu spirituel.

En allant vers l’ouest il y aussi  des cascades et de belles rivières, Lokomboro, Pabeti lakera, Manokona, Bendungan Waikelo Sawah.  
Le sud de Waikabukak est aussi à explorer, c’est un coin avec des plages superbes mais souvent dangereuses, plus propices au surf. C’est un endroit où on trouve des Pasolas et voir les cavaliers entrainer les chevaux sur la plage est saisissant. C’est aussi là qu’on trouve le resort de luxe  Nihiwatu complètement hors sol. Attention il est strictement impossible de s’en approcher sous peine d’être refoulé. Et il y a partout des Kampung traditionnels. Et des cascades dont celle  réputée de Lapopu (cascade =air terjun).  Pour tout cela, soit vous prenez une moto soit vous prenez un guide. Mais franchement,  seul il est difficile de se repérer.
N’hésitez pas à passer du temps dans ce coin, il y a énormément à voir et à faire.















Waingapu et ses environs

Waingapu est une grosse ville, la partie la plus sympa est vers le vieux port. On arrive dans le nord est de l’ïle. Les paysages sont encore plus secs et sont souvent  constitués de collines qui offrent de belles couleurs et de doux contrastes. C’est entre Waigapu et Waikabukak que vous aurez les plus belles vues sur ces collines, à Bukit Warinding ou Bukit Ndapayami mais aussi au sud de Waingapu à Bukit Tanau. Il y a aussi de belles cascades mais là aussi c’est compliqué sans se faire accompagner.
Sinon la mangrove à l’est de Waingapu permet de beaux clichés. Allez à Pantai Walakiri plutôt à marée basse et au coucher de soleil.
C’est dans cette région qu’on trouve les plus beaux Ikats.
C’est au sud à nouveau que vous trouverez de belles plages mais il faut réussir à les rejoindre…



L’est
L’est lui-même est peu visité, pas de logement, des routes difficiles à trouver. A vous l’aventure !

8.  Pour les passionnés de snorkelling et de plongée

Sumba n’est franchement pas la bonne destination. Il semblerait qu’il y ait des coins convenables à l’est mais il y a au même endroit des cultures d’algues donc j’ai des doutes.
J’ai même envie de dire que Sumba n’est pas idéale pour nager tout simplement. Entre les vagues, les courants et les crocodiles, on est quand même limité. On a nous même très peu nagé malgré les superbes plages pendant notre séjour et on a été heureux d’en profiter ensuite à Flores et Alor.




9.  Pour résumer

Sumba est une île intense, pas facile à explorer mais qui vous marquera profondément. Ne vous contentez pas de l’explorer uniquement avec un guide même si il est souvent indispensable. Osez vous aventurer seuls avec une moto, les sensations seront plus fortes, les rencontres en particulier.
Pour pouvoir vous faire un vague itinéraire, faites appel à ce guide qui est le plus complet disponible sur Sumba, vous apprendrez plein de choses. Il y a aussi une carte qui vous aidera bien même si vous ne trouverez pas toujours ce que vous voulez. Il existe depuis 2019 en français (c’est même ma cadette qui a assuré la traduction et on fait appel de temps en temps à elle pour les mises à jour).
https://www.sumba-information.eu/







@Sumba