Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
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Hannah
mjp
Lucbertrand
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Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Je vais vous présenter une balade à travers le Haut Atlas qui remonte à une dizaine d'années. J'en ai repris le texte, le simplifiant, essayant d'en améliorer le style, cherchant à remédier à mes lacunes en ponctuation et cherchant impitoyablement à traquer et éliminer les fautes d'orthographe.
La réécriture d'un texte pour le rendre plus facile à la lecture est un exercice qui demande du temps et surtout de se creuser les méninges. D'autre part, cela replonge dans le voyage en question bien qu'il remonte à plusieurs années, et c'est un peu une manière de le revivre, et le raviver dans sa mémoire.
Voilà le premier épisode de ce texte que je vais présenter en trois parties:
Maroc 11 jours à pied dans le Haut Atlas autour du M'Goun
La réécriture d'un texte pour le rendre plus facile à la lecture est un exercice qui demande du temps et surtout de se creuser les méninges. D'autre part, cela replonge dans le voyage en question bien qu'il remonte à plusieurs années, et c'est un peu une manière de le revivre, et le raviver dans sa mémoire.
Voilà le premier épisode de ce texte que je vais présenter en trois parties:
Maroc 11 jours à pied dans le Haut Atlas autour du M'Goun
Une bande de Basques enthousiastes m’a persuadé de partir avec eux pour une balade de 11 jours dans l’Atlas marocain. Le premier objectif était de gravir le M'Goun, puis de cheminer jusqu'à la vallée des Roses.
Je vais donc décrire cette promenade dans le Haut Atlas, le long d'un itinéraire très connu sur lequel les trekkeurs occidentaux sont nombreux. Cependant, bien qu'ayant eu quelques craintes de parcourir ce circuit, de peur d'être confronté à la foule de mes semblables, le voyage a été très agréable. Le cadre magnifique, à lui seul, justifie tous les bains de foule, qui cependant n'ont pas eu lieu. Les groupes rencontrés parfois à certaines étapes ou croisés, n'ont pas représenté de gêne. Je ne peux que conseiller ce genre d'expérience, même aux amateurs de solitude et de randonnées en solitaire.
1er jour.
Après un départ de Bordeaux quelque peu mouvementé prévu à 22 h qui a finalement eu lieu à 4h du matin, un vol court nous amène à Marrakech au lever du jour. Après quelques heures passées à Marrakech nous mettons le cap en bus sur le village de Tabant.
Le pays est très sec et rocailleux. Vers midi arrêt dans une petite ville, nous déjeunons dans un restaurant à l'atmosphère étouffante. De nouveau sur la route, les montagnes commencent à se dresser devant nous. Un col en altitude barre l'horizon. Juste avant de l'avoir atteint, Ali notre guide, fait arrêter le véhicule devant un groupe de paysans occupé à battre le blé à l'aide de chevaux qui le foulent sous les sabots. Ils tournent en ligne de front sur une aire circulaire et les paysans jettent au vent à la fourche la paille qui s'envole au gré des courants d'air. Le but étant qu'à la fin de l'opération il ne reste que le grain au sol. Certains d'entre nous vont s'initier à la conduite des trains de chevaux, tels des Ben Hur, et au coup de fourche dans le ciel, ce qui déclenchera un fou rire généralisé aussi bien de la part des paysans marocains que de la nôtre.
Du col nous plongeons dans une vallée profonde. Tabant, le terme de notre voyage en véhicule est atteint, village blotti à 1850 mètres d'altitude. Le cadre est magnifique. Le lieu est dominé de montagnes imposantes, à l'allure aride. Le gîte est une bâtisse sur un niveau avec une cour intérieure sous le regard des sommets environnants. Si l'air est plus frais qu'à Marrakech, les mouches manifestement le savent et apprécient aussi le coin.
Nos affaires déposées, nous partons à la découverte des environs. Un imposant tertre d'une centaine de mètres de haut nous invite à l'escalade. Une sente escarpée conduit au faîte. Le panorama est magnifique. Une multitude de groupes de maisons couleur terre sont accrochés le long des plissements de cette chaîne montagneuse puissante. De nombreuses terrasses à la teinte dorée, servant au battage des céréales, s'échelonnent au-dessus de la bourgade. A cette heure chevaux et paysans ont regagné leur demeure. Le vert des cultures tranche très nettement sur la couleur terne qui domine. Le ciel, lui-même, affiche une couleur presque neutre. La quantité de particules en suspension, faisant en quelque sorte le lien entre le sol et l'atmosphère, donne cette apparence du brouillard ténu.
Au sommet, une imposante construction circulaire trône et impose sa silhouette. Il s'agit d'une ancienne ferme. L'occupant des lieux nous offre le café aimablement, cependant il nous fait remarquer que nous ne le payons pas assez. Aïe, aurions-nous fait une erreur, voire une impolitesse ? Les choses s'arrangent, mais le tenancier du lieu semble nous en garder quelque grief.
Retour au gîte, comble du luxe, il y a même une douche. J’ai toujours des scrupules à l’utiliser, ayant pris l’habitude en voyage en autonomie à me laver les endroits stratégiques avec 20 centilitres en tout. Le repas sera sympathique et l'ambiance au rire et à la joie à l'idée de la magnifique balade qui commence le lendemain. Aucun d'entre nous ne connaît cette région, ce qui fait que la curiosité et l'empressement nous rendent tous impatients de nous retrouver quelques heures plus tard.
2ème jour.
Répartis dans deux pièces exiguës, nous avons dormi sur des paillasses à même le sol et passé une nuit correcte. Dès le lever du jour, sans bruit, je me sauve pour profiter d’un moment de solitude pour me plonger dans la contemplation de ce monde minéral. Je suis accueilli par un spectacle grandiose. Le soleil se lève et illumine les grandes pentes de caillasses escarpées et arides qui jaillissent. La clarté dessine toutes les arêtes et laisse les gorges à leur mystère. Une telle vision réveille instantanément mon instinct de grimpeur et j'imagine quelque itinéraire d’escalade le long de ces rochers.
Avec quelque indiscrétion, je pars à l'aventure au milieu de grands bâtiments en torchis qui jouxtent notre refuge. Les murs sont rongés de trous béants, le résultat de la pluie ruisselant sur ces constructions en boue séchée. Cette terre, de laquelle les habitations sont construites, est la même qui constitue les immenses flancs de la montagne. On passe des unes aux autres sans aucune rupture dans les tons et les couleurs. De cette uniformité se dégage une impression particulière, comme si l'homme dans ces contrées faisait réellement partie intégrante du décor en s'y fondant complètement, bien loin de l'impression que dégage une maison de briques ou de béton.
La première étape se déroule dans une large vallée. De grands arbres aux épaisses feuilles nous accompagnent le long d'un ruisseau. Au débouché dans un champ, deux cigognes nous regardent passer. Elles ne montrent pas le moindre signe d'inquiétude. De toute évidence elles ont l'habitude de voir ces visages pâles étonnés, marquer l'arrêt et sortir leur troisième œil pour les immortaliser dans le but de les classer dans un énième dossier de voyage. Vient une halte à l'ombre d'un immense noyer, assis en rond à même le sol sur de gros galets. Ali fait circuler son sac de fruits secs. Outre les arachides et autres noix de cajou, quelques magnifiques dattes font la joie de tous. Il s'agit de la toute première pause, prélude à un rite qui s'accomplira deux fois par jour durant deux semaines. Nous découvrons ce guide attentif, cultivé qui connaît magnifiquement son pays.
Puis la marche reprend. Le chemin longe à nouveau des aires de battage des céréales. La technique utilisée, jeter à la fourche la paille en l'air afin que le vent en emporte les particules légères dont on veut se défaire, doit être millénaire. Bien qu'en terre musulmane on ne peut s'empêcher de penser aux débuts de l'ère chrétienne. Les animaux et les hommes que nous regardons feraient des personnages idéaux dans une crèche le jour de la naissance du Christ.
Sur notre droite une vallée secondaire apparaît. Elle donne accès au col Tarkeddit dont l'altitude est de 3300 mètres. Nous ne le franchirons que le lendemain, car le bivouac est prévu quelque part sur un replat à son pied. Avant de quitter la vallée principale, je ne peux m'empêcher de la contempler une dernière fois et de me demander par quel phénomène géologique titanesque, ces grosses pyramides de terre et de pierres, parcourues d'immenses strates aux courbes torturées, ont pu prendre naissance et se dresser au beau milieu de cette large dépression.
Le fond du vallon est parcouru par un torrent alerte, dont les multiples cascades soulèvent une écume qui contraste avec ce relief semi-désertique. Après avoir erré quelque peu au milieu de broussailles au confluent des deux vallées, un chemin bien dessiné montre la direction. La montée commence. Il va nous falloir franchir le torrent. Nous regardons nos mules lourdement chargées s'acquitter de cette opération. Nous traversons à notre tour.
L'heure du repas approche. Une petite plaine légèrement verdoyante se présente. Un monticule caillouteux la domine, sur lequel un troupeau de moutons se presse. Ils se confondent avec les pierres de même corpulence et à la couleur mimétique. Au détour d’une bergerie, une belle table au centre de laquelle un plat rond entouré de onze assiettes joliment remplies d'une magnifique salade de crudités aux couleurs vives nous attend. Nos muletiers sont en plus des artistes de la cuisine et de la décoration.
Après cette halte bien agréable, la marche reprend vers le fond de la vallée. A l'arrière-plan le M'Goun ou Amsod (vent) se dessine. Un chemin part sur la droite. Sur un replat nos muletiers ont préparé le campement pour la nuit. Chaque soir la même opération se renouvellera. Une fois bien installé, chacun vaque à ses occupations. Le ruisseau permet un décrassage sommaire. A la tombée de la nuit nos accompagnateurs marocains entonnent des chansons traditionnelles accompagnées d'instruments de musique rudimentaires, grelots, gros bidon vide, bassine en plastique et même une boîte de conserve, qu'ils utilisent comme instruments à percutions. Les Basques donnent la réplique en entonnant leurs chants que tous reprennent en cœur. Je me sens vraiment bercé par des traditions qui ne sont pas les miennes. Marocains et Basques sont sur la même longueur d'onde lorsqu'il s'agit d'entonner leurs chansons à tue-tête. Cette ambiance est extraordinaire. Juchés sur notre terrasse, perdue au milieu d'un immense pan de montagne, nous assistons à l'arrivée de la nuit et du mystère qui descend sur cette terre d'altitude. Les formes et les dimensions deviennent imprécises et permettent à l'esprit toutes les extravagances. Avec un peu d'imagination, dans ces boursouflements verticaux qui se drapent de secret avec les ténèbres, je m'imagine toute une faune préhistorique qui a pu peupler ces escarpements, que le pied de l'homme n'a certainement pas encore foulés en bien des endroits. Peut-être que pas très loin, dans le creux d'une couche géologique protectrice, un spécimen vieux de plusieurs millions d'années, attend patiemment de nous révéler ses secrets. Moi l’adepte du voyage en solitaire ou en binôme, je dois reconnaître que le voyage en groupe apporte d'autres joies que celles de la solitude.
Dans la spacieuse tente salle à manger nous allons poursuivre la découverte des dons culinaires de notre cuisinier. Il me reste en mémoire une impression de manger des plats bien présentés à la saveur prononcée.
3ème jour.
Après une nuit tiède sans plus à 2250 mètres d'altitude et un sommeil réparateur, le décor fabuleux de la montagne marocaine nous accueille. Un raidillon de mille mètres doit nous conduire au col de Tarkeddit donnant accès au plateau du même nom au pied du M'Goun. La végétation change. Seuls subsistent de gros buissons en boule aux piquants acérés, dont la couleur verte contraste étonnamment avec la couleur ocre du sol complètement desséché. La nature s'adapte à toutes les conditions. Dans certaines parties du désert il existe même des poissons, qui lorsque l'eau se retire, s'enfoncent dans la boue avant qu'elle ne sèche. Une fois à l'intérieur, la sécheresse arrivant, ils se transforment en produit déshydraté, et peuvent attendre plusieurs années la pluie qui les regonflera et leur rendra en quelque sorte la vie pour un temps ! Comment imaginer qu'une telle évolution conduisant à l'adaptation aux conditions locales soit simplement le fruit du hasard ?
Le chemin raide s'étire en de nombreux lacets le long d'un flanc de montagne constellé de myriades de ces gros buissons piquants. Les différents groupes de trekkeurs s'échelonnent sur ces mille mètres de dénivelé. Les mules au chargement multicolore et parfois hétéroclite donnent une touche étonnante à la scène. On distingue d'une part les trains d'animaux qui accompagnent les touristes et d'autre part les équipages qui se livrent au commerce de vallée en vallée et ravitaillent les villages. Ils se distinguent facilement par leur chargement. En effet, dans le premier cas, les ustensiles de camping avec matelas et tentes prédominent sur le dos des animaux, tandis que pour les seconds il s'agit de sacs contenant du ravitaillement et en particulier des céréales.
Une fois le col atteint, l'Amsod, du haut de ses 4000 mètres, nous saute à la figure et obstrue tout l'arrière-plan. Sa couleur sombre, grise presque noire par endroits, est mise en exergue par deux grosses taches de neige qui soulignent son arête terminale. L'endroit est venté et nous nous abritons en nous collant à de gros rochers pour faire une pause. Le froid est tout relatif, cependant nous réagissons à l'amplitude thermique. La vue de ce point de passage est magnifique, la terre prend toutes sortes de couleurs, en particulier par endroit une teinte indéfinissable, peut-être lie de vin en mode pastel. À nos pieds se dessine le large plateau de Tarkeddit dont l'altitude est de 2900 mètres. En quelques centaines de mètres de dénivelé nous le rejoignons. Il sera notre lieu de campement ce soir. Ce site est à la croisée de nombreux itinéraires de treks, ce qui explique le nombre important de groupes qui y stationnent. Mais il y a de l'espace et nous ne nous gênons pas les uns les autres. Cependant, ceux qui veulent aller prendre une douche au refuge doivent faire la queue dans l'attente d'un peu d'eau. Je ne ressens pas le besoin de me laver. Notre lieu de campement est suffisamment éloigné de cette construction pour nous permettre d'être bien tranquilles. De nombreux animaux paissent sur ce grand terrain plat. On y croise des chevaux, des mulets, des chèvres et quelques camélidés. Un spectacle attire l'œil. Une jeune femme au port altier et à l'allure sauvage passe à grandes enjambées, suivie de près par de magnifiques chameaux blancs. Elle se refuse à toute photo, dommage car elle a vraiment fière apparence à la tête de son troupeau.
Lucbertrand- responsable de rubrique
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BernardBayle apprécie ce message
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Souvenir, souvenir, j'ai traversé la chaîne du M'Goun depuis Tabannt jusqu'à la vallée des Roses il y a bientôt 30 ans, ça ne rajeunit pas....
En une dizaine de jours nous n'avions rencontré que de rares randonneurs, depuis la mode du trek et le développement des agences a bien changé les choses.
Je suis retourné dans la vallée des Roses en voiture il y a quelques années et j'ai redécouvert quelques villages maintenant accessibles par une route goudronnée au lieu de l'ancien chemin muletier
Merci pour ce récit et les photos
En une dizaine de jours nous n'avions rencontré que de rares randonneurs, depuis la mode du trek et le développement des agences a bien changé les choses.
Je suis retourné dans la vallée des Roses en voiture il y a quelques années et j'ai redécouvert quelques villages maintenant accessibles par une route goudronnée au lieu de l'ancien chemin muletier
Merci pour ce récit et les photos
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
il semblerait que vous étiez dans cet Agadir ( grenier collectif) magnifique dans cette vallée et dont un gardien fait faire la visite . Il s’attendait à un bon pourboire .Au sommet, une imposante construction circulaire trône et impose sa silhouette. Il s'agit d'une ancienne ferme. L'occupant des lieux nous offre le café aimablement, cependant il nous fait remarquer que nous ne le payons pas asse
Hannah- modérateur
- Messages : 2505
Date d'inscription : 08/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
4ème jour.
Lever très matinal, de nuit, car Ali veut éviter tout risque d'orage sur le sommet que nous comptons grimper aujourd'hui. Nous démarrons avec l'arrivée de l'aurore. Un long vallon caillouteux conduit à une arête, qu'il nous faudra suivre pour atteindre le but. Tout n'est que minéral, plus une seule plante, seulement cette pierre sombre à perte de vue. Il fait frais, le vent souffle avec force. Nous sommes tous emmitouflés. Les groupes nombreux et compacts comme repliés sur eux s'égrènent sur cette sente austère. On sent une certaine compétition monter, sans doute générée par les différents guides et, le rythme s'accélère. Les groupes parfois éclatent, semant au gré du chemin les malheureux qui perdent le souffle. Mais les guides veillant, des haltes sont imposées pour rassembler les troupeaux. Au cours de ces arrêts le corps se refroidit et la reprise de la marche est une délivrance.
L'arête est atteinte, son altitude se situe aux environs des 3900 mètres. La vue s'étend presque à l’infini et se perd dans les prémices du Sahara. Cette crête court en ondulations amples, tout là-bas, jusqu’à la cime. Elle s'incurve au-dessus d'un vaste versant couvert d'un gigantesque pierrier sombre, par lequel nous rejoindrons le profond vallon qui nous conduira à la vallée d'Oulilimt. De par l'effet de perspective, la trace de descente qui fend ce vaste versant nous apparaît d'une raideur extrême. Cette illusion trompeuse est due à la vue de face de ce pan de montagne situé à l’autre bout de la crête en demi-cercle.
Enfin le sommet est atteint. Cette longue marche aérienne entre deux versants de grande ampleur est un enchantement. On se prend à espérer que ce déplacement ne finisse pas. La cime représente le point désiré de notre randonnée. Cela fait trois jours que nous la voyons se rapprocher lentement. Tout naturellement la joie explose sur tous les visages. Une longue station est nécessaire pour assouvir tout ce plaisir, qui concrétise un rêve de plusieurs mois pour certains, voire de plusieurs années pour d'autres.
Le moment de quitter ce lieu haut perché arrive. Un dernier regard circulaire sur ce panorama désertique et nous plongeons dans un pierrier raide. Le calibre des pierres est idéal pour se lancer dans une course effrénée à grands bonds. Mais aujourd'hui par égard pour les compagnons, il faut réfréner ses ardeurs et garder une vitesse de descente modérée, car une blessure occasionnerait une gêne pour tout le groupe.
Après ce grand cirque rapidement dépassé, un long vallon aux couleurs sombres s'enfonce entre des parois rocheuses. De façon imperceptible la végétation réapparaît. Au fond d'une gorge profonde subsistent quelques restes de neige, résultant sans doute de grosses avalanches qui sont venues s'accumuler dans cette dépression. Il y a quelques années à cet endroit s'est déroulé un drame. Deux randonneuses lyonnaises sont mortes, surprises par le mauvais temps de nuit.
Par touches successives la couleur ocre se substitue au gris. La chaleur se fait plus insistante. Les gros buissons verts sont à nouveau présents. Le long d'une petite crête une chamelle et son petit s'en nourrissent. Mais comment font-ils pour mâcher ces épines dures comme du fer et effilées comme des rasoirs ? Enfin, le regard discerne le fond de la vallée, où le campement monté par nos muletiers nous attend. Il est treize heures, la chaleur dans ce recoin rocheux est terrible. On se croirait dans un four. Un ruisseau à l'eau froide permet de se rafraîchir et se laver, sans savon. S’allonger dans le ruisseau est amplement suffisant en termes d’hygiène.
Je profite de cet après-midi pour observer les environs et tout particulièrement les chameaux qui broutent autour du camp. Ils s'aventurent sur des pentes en éboulis instables sans la moindre hésitation et jamais ils ne dérapent. Leurs sabots sont de véritables crampons.
Avec le déclin du soleil l'ombre arrive assez tôt, du fait de la hauteur des sommets qui nous entourent. D'autres groupes campent dans les parages, mais les distances sont suffisamment grandes pour que nous ne nous entendions pratiquement pas. Sous la tente salle à manger la soirée sera encore très conviviale. De toute évidence voyager de cette manière est très différent du voyage seul avec un sac réduit. Dans ce dernier cas souvent les nuits sont beaucoup plus spartiates et la nourriture moins diversifiée. Dans le fond ça fait du bien de se laisser dorloter.
Une fois la nuit bien installée je pars contempler les étoiles. Les conditions sont idéales, l'altitude, l'absence de lumière résiduelle et un ciel sans nuage sont les éléments nécessaires à un spectacle de grande beauté. Je m’interroge sur le paradoxe de la nuit noire. Certains calculs montrent que du fait de la multitude de corps cosmiques qui nous éclairent la nuit, la lumière qui en découle devrait être des milliers de fois plus intense que celle que nous percevons. Cette constatation milite pour la théorie de l'expansion de l'univers. En effet, ce paradoxe de lumière manquante provient du fait que le calcul est fait en statique ce qui démontre que l'hypothèse est fausse, et par conséquent semble prouver que les galaxies s'éloignent les unes des autres. Une belle voûte étoilée permet les rêves les plus fous et souvent on reste bien en-deçà de la réalité scientifique, qui tous les jours fait des découvertes toujours plus époustouflantes. Le dictionnaire amoureux du Ciel et des Etoiles de Trinh Xuan Thuan est un livre très accessible faisant un point clair et compréhensible pour tous sur les avancées actuelles dans ce domaine.
5ème jour.
Le matin, comme nous le faisons depuis trois jours, le rite du branle-bas commence à se rôder. Un bon petit déjeuner nous est servi, puis nous fermons chacun notre sac que nous entassons, et nous nous mettons en route. Les muletiers se chargeront de tout récupérer et de constituer les chargements des mules. L'étape de ce jour se déroule, pour sa première partie, le long d'une petite sente qui domine le cours d'eau. La végétation est extraordinaire. Toujours ces grosses boules de piquants, certaines d'entre elles fleurissent et se couvrent d'une multitude de petites fleurs jaunes. Par endroits, le sol couleur ocre est semé de gros cailloux de la même teinte.
Les thuyas ces arbres incroyables font leur apparition. Le thuya est une curiosité à plus d'un titre. Tout d'abord, en contemplant les pans des grandes montagnes qui nous entourent, on réalise qu'il a colonisé bien des escarpements. Il ne s'agit pas d'un arbuste, car certains échantillons approchent les dix mètres de haut. Comparativement à la masse de bois le feuillage est de petite dimension, un peu à la manière de touffes éparses accrochées à des branches massives. Chaque individu a des mutilations à la scie. Une senteur puissante et très agréable se dégage des sections coupées. Ali nous explique que chaque arbre a un propriétaire et qu'il ne s'agit pas d'aller couper une branche d'un thuya propriété du voisin. Certains sont éloignés du chemin et difficile d’accès, ils ont cependant un propriétaire. De toute évidence ils sont multi-centenaires, probablement millénaires pour nombre d'entre eux. Ils doivent se transmettre par héritage.
Alors que nous profitons d'un point de vue magnifique sur la vallée que nous dominons, nos muletiers nous dépassent. Ils ont fière allure, le chef muletier dans sa djellaba marron et le cuisinier, grand noir au port altier et au regard pétillant, vêtu de clair hormis son couvre-chef noir. Les animaux, malgré leur chargement volumineux, se déplacent sans difficulté sur ce sentier étroit et aérien.
Quelques lieux d'habitation estivale d'éleveurs attisent la curiosité. La famille complète y séjourne, les conditions de vie sont spartiates. Les maisons sont de simples tas de cailloux à hauteur d'homme couverts d'un peu de terre. En contrebas du chemin on les distingue à peine des amoncellements de pierres dus à la nature. Des petits enfants s'égayent autour. Des femmes à l'air farouche, à moins qu'elles ne soient excédées, montrent des signes de mécontentement si l'on essaie de les photographier, bien que le sentier passe à une distance de quelques centaines de mètres.
Une descente raide nous ramène au fond de la vallée en un point étonnant, une grande zone d'érosion à la confluence de deux gorges. Une multitude d'édifices de terre, telles des citadelles en ruine, se dressent en troupe serrée en bordure de rivière. Le lieu est idéal pour la pause de midi. La fraîcheur, conjugaison de l'eau qui court, de l'ombre que prodiguent ces grandes cheminées de fées et du courant d'air créé, donne à cette halte une touche paradisiaque. Tous en profitent pour se baigner. Pour ma part, je pars me perdre dans les couloirs profonds, raides et glissants qui s'enfoncent dans ces roches érodées. Je gagne quelques dizaines de mètres et je décide de m'arrêter pour des raisons de sécurité. Le point de vue est enchanteur. L’un des énormes rochers posés à même les galets sur la partie sèche du lit de la rivière ressemble à une grosse bête préhistorique qui semble le gardien du lieu, à moins qu'il ne s'agisse d'une mariée avec une traîne imposante. Ces montagnes donnent loisir à toutes les digressions de l’esprit lorsqu'on observe le travail de l'érosion sur la roche.
Retour à la piste qui suit le lit d’un torrent asséché. Les pierres claires surchauffées et la réverbération rendent l’exercice pénible. Le chemin louvoie à même les galets. L'altitude diminue et la sensation de touffeur augmente. Près quelques heures de marche, le camp établi en bordure de rivière est le bienvenu. La vallée est large, en forme de U. L'eau est tentante, peu profonde et vive. L'endroit est idéal pour un rafraîchissement. Quelques constructions avivent notre curiosité. Il s'agit d'un grenier à grains de belles dimensions. Ces édifices en torchis donnent toujours l'impression de déliquescence. Un jeune couple de Français, croulant sous des sacs énormes, remonte la vallée. Ali leur offre le thé.
De retour vers le campement, accompagné de Jean-Paul, je remonte la rive opposée de la rivière. Une petite cascade jaillit d'un muret. Jean-Paul pense qu'il s'agit d'une source et s'abreuve abondamment. Cela me paraît bizarre. J'escalade le mur d'où l'eau gicle et je constate qu'il s'agit d'un défaut d'étanchéité du muret d'un canal d'irrigation. Les animaux de toutes sortes viennent s’y abreuver. La boire comme l'a fait mon camarade peut entraîner quelques désagréments. Il ne s'émeut pas pour autant. Séance tenante, il croque quelques pastilles de désinfection. Le remède sera efficace, il n'aura aucun trouble digestif.
Le lieu se nomme Tighremt n'Aït Ahmed et se situe à 2200 mètres d'altitude. Comme tous les soirs précédents l'ambiance sera à la fête, les rires et les chansons fuseront de toutes parts. Je m'étonne parfois de trouver un tel plaisir à une randonnée en groupe important. Le sommeil sera calme et profond. Dans ces contrées il n'y a pratiquement pas d'humidité d'où absence totale de condensation dans les tentes, ce qui explique peut-être en partie la quiétude des nuits.
6ème jour.
Déjà le cinquième jour de marche. La végétation change avec l'altitude qui diminue. Dans les méandres de la rivière apparaissent de grandes zones verdoyantes, arbres à feuilles caduques et champs cultivés. Le contraste, entre le brun clair des pentes de rocher et le vert profond qui colonise par endroits le fond de la vallée, donne une touche nouvelle au décor. Le chemin conduit au travers de villages en corniche, dont les maisons se confondent avec la montagne environnante et s'y intègrent parfaitement par leur forme simple et leur teinte. Les villageois sont habitués à ces trains de touristes. J'évalue à une dizaine, au moins, le nombre de groupes par jour qui suivent ce sentier à cette saison. Dans l'un des bourgs, deux tous petits gamins, huit ans au maximum, sont juchés au sommet d'un mulet et essaient de le faire manœuvrer dans une rue étroite. Un peu avant ce même village, un autre gamin à l'air abattu, monté lui aussi sur un âne, s'est approché de nous et nous a demandé des médicaments car il avait une rage de dents ou mal à la tête. Nous lui avons donné quelques cachets d’aspirine et il a repris son chemin en remontant la rivière.
La halte de midi a lieu au gîte chez Jarnel, magnifique construction à un étage au pied d'une falaise escarpée. L'intérieur est de toute beauté, la charpente en thuya dégage un parfum puissant dans chacune des pièces. Des enfants nous pressent pour se faire photographier dans l'espoir de récupérer quelques pièces. Cet arrêt aux heures chaudes est un bon prétexte pour effectuer un tour au frais en bordure de rivière. De nombreux enfants s'y amusent. Un petit bout de chou de trois ou quatre ans, seul sur la rive, descend d'une démarche pas très assurée. S'il tombe à l'eau, étant donné le courant, je crains que sa vie ne soit mise en réel danger. Mais cela ne semble déranger personne. C'est peut-être cela le fatalisme musulman ? Inch Allah !
Quelques heures de marche nous mènent à Igherm Izdarn. La famille de notre guide nous héberge. Ce dernier récupérera son jeune fils qui nous accompagnera sur la fin du voyage. Le repas sera sous les hospices du mouton à la façon locale. Dans un four en terre un feu est allumé, une fois que la quantité de braises est suffisante, le mouton embroché est piqué dans les braises. L'orifice supérieur du four est alors hermétiquement obstrué à l'aide de terre mouillée, constituant un enduit qui colmate hermétiquement et empêche tout échange, en particulier d'oxygène. Après un temps de cuisson long, la croûte de terre qui a séché est brisée et, alors apparaît le mouton magnifiquement doré. Cette viande est succulente, cuite uniformément en profondeur. La nuit à l'intérieur de la maison sera moins confortable que sous la tente, la chaleur et le manque d'air seront une gêne pour le sommeil.
Lucbertrand- responsable de rubrique
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Date d'inscription : 07/12/2021
Deborah et AJFT apprécient ce message
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
7ème jour.
Au matin, je suis bien content de sortir à la recherche d'un peu de fraîcheur. Aujourd'hui l’itinéraire suivra une variante durant trente-six heures. Au sortir du village, une petite épicerie accueillante, nous nous y engouffrons tous à la recherche de quelques friandises et autres bouteilles de jus de fruit chimique.
Notre chemin abandonne la vallée que nous parcourons depuis plusieurs jours. Le premier point de passage consistera en un col donnant accès au vallon d'à côté. Au cours de cette diversion à la grande classique nous serons seuls.
La halte de dix heures a lieu dans le village du frère d’Ali. Nous sommes reçus avec beaucoup de gentillesse pour le thé. De succulents petits gâteaux accompagnent la boisson. Le moment passé dans ce village nous laissera un très agréable souvenir. Une fois de retour dans le lit de la rivière, nous reprenons notre marche vers le col. Le paysage est imposant, des falaises nous encerclent, des thuyas de grandes tailles au bois torturé ponctuent le sentier. Ces arbres sont vraiment étonnants, ils sortent d'une terre complètement aride et exhibent des troncs et des branches de taille imposante. Je ne me lasse pas de les admirer. Ils sont tous différents et présentent des courbes et des volumes très esthétiques, et puis ils sentent si bon !
A proximité du col, une vaste bergerie, à peine surélevée du sol, non occupée nous offre un lieu de déjeuner agréable et original. De cet emplacement, la vue sur la vallée en contre-bas et, sur les montagnes qui nous entourent, est absolument magnifique. A part nous, absolument personne. Je me fais la réflexion que dès que l'on quitte les itinéraires à la mode, la montagne est presque déserte. J'ai déjà fait ce type d'expérience dans les Alpes et les Pyrénées. Après une longue pause, la brèche est rapidement atteinte. La zone est presque désertique. Seul, de loin en loin, un thuya apporte sa pointe de verdure. Ce type d'endroit, j'aimerais m'y arrêter pour y passer la nuit seul face aux étoiles. Mais il n'en est pas question. Nous basculons dans une autre vallée et, rapidement le village d’Arg se dévoile.
Une petite terrasse un peu au-dessus de la rivière offre un superbe emplacement de bivouac. Rapidement des enfants nous abordent. L'un d'entre eux tient dans ses bras une mignonne petite chèvre. Les tentes sont installées en cercle. Ce soir la douche est prise directement dans le courant du cours d'eau. Cela nous fait dire que la montagne a des yeux, car manifestement cela éveille de la curiosité, que nous trouvons un peu trop insistante.
La soirée une fois de plus se traduit en un bel échange entre Basques et Marocains, tout à mon plaisir de les écouter. La vue de notre promontoire sur cette vallée déserte fermée par un grand cirque de montagnes, nous met en présence de la beauté du Haut Atlas. Le regard ne se lasse pas de se déplacer le long des à-pics. Lorsque le soleil plonge derrière les sommets, la roche de toutes parts s'illumine de couleurs qui donnent l'illusion d'un monde en fusion.
8ème jour
Nous quittons à regret notre nid d'aigle. Encore une demi-journée avant de retrouver la vallée principale et ses trains de trekkeurs. En la rejoignant la halte a lieu sous un auvent rocheux. Notre cuisinier, bien assis collé contre le rocher, met en œuvre des marmites avec entrain. Nous sommes installés le long d’une large strate dont la lèvre supérieure est en surplomb et offre de ce fait une protection. La rivière nous invite à la baignade. J'en profite pour la remonter jusqu'à une cascade d'environ un mètre cinquante de dénivelé. J'assiste à un spectacle assez époustouflant. Au beau milieu de l'écume, une petite truite de quatre centimètres essaie de remonter et se fait rejeter vers l'aval. Si l'on tient compte des proportions, on pourrait imaginer un saumon de quarante centimètres essayant de passer une cascade de quinze mètres !
La gorge se resserre et des parois de grande hauteur donnent un caractère austère au lieu. Haut perchés, des restes de constructions en plein milieu d'une paroi nous intriguent. Ali nous explique qu'il s'agit des ruines d'une garnison portugaise qui cantonnait dans cet endroit reculé deux siècles auparavant. J'imagine l'impression d'éloignement que devaient éprouver les militaires envoyés en mission au milieu de ces gorges austères. Un chemin en encorbellement, après avoir passé un verrou vertigineux, donne accès à un élargissement de la vallée.
Nous installons notre campement à Tarzount, au pied d'une falaise imposante. Le panorama est impressionnant, on se sent écrasé. Bien évidemment, mon esprit ne peut s'empêcher d'imaginer de belles lignes d'escalade le long de piliers aériens et de dièdres qui jaillissent presque jusqu'au ciel. Chaque soir, le lieu de campement est différent. Aucune lassitude ne s'installe. Bien au contraire, l'envie que l'aventure continue est un souhait. Mais nous sentons que nous avons basculé dans la dernière partie de notre randonnée et que la fin se rapproche. Mais n'y pensons pas trop et profitons de ce spectacle en permanence renouvelé. Un énorme arbre abattu est étendu pratiquement dans notre bivouac. A-t-il été amené à cet endroit par la rivière en crue ?
9ème jour.
Au matin, au sortir de la tente, la vision sur cette falaise que j'ai pourtant regardée sous toutes ses coutures la veille, ne laisse pas de m'impressionner. Aujourd'hui nous allons progresser dans l'eau d’une gorge étroite de toute beauté. Nous quittons nos chaussures de randonnée pour chausser soit des baskets ou des sandales. Ce qui est mon cas, mes chaussures spéciales canyon font merveille et permettent une marche aisée. Cette marche dans vingt à trente centimètres d'une eau courant à vive allure est un enchantement. Par endroits les parois sont si rapprochées que l’obscurité n’est pas loin. De gros bombements nous cachent le ciel et donnent l’impression d’être dans une grotte. Je n’ose imaginer une crue dans ces coins, la hauteur des flots doit être gigantesque dans ces étroitures. Au milieu de la gorge, un chemin incroyablement escarpé escalade le fond d’un couloir presque vertical. Il s’agit d’un itinéraire emprunté lorsque le débit de l’eau ne permet pas l’utilisation du lit de la rivière.
D’un coup les parois s’écartent et permettent à la rivière de s’étaler le long d’une petite plage, sur laquelle une échoppe propose café et autres boissons ainsi qu’un assortiment de bijoux rudimentaires. Immédiatement, nous sentons à une foule de détails que nous allons quitter le domaine de la haute montagne. A l’arrêt de midi, une nuée de gamins viennent nous voir. Ils sont habillés de vêtements éculés. Une petite fille de six ans porte sur son dos sa sœur d’un ou deux ans et à aucun moment ne la posera au sol, malgré l’effort qu’elle produit.
Ce soir, nous campons à Aguerzaka, village à 1750 mètres d’altitude. Le bivouac est installé dans l’enceinte d’un ancien édifice pratiquement disparu. Seuls en subsistent des restes de murs effondrés qui délimitent le périmètre de notre campement. Les environs immédiats, de toute évidence, servent de lieu d’aisance aux habitants du hameau. Il faudra faire attention si nous sommes amenés à circuler de nuit. Ali nous emmène chez le sage du village qui nous offre le café. Les montagnes autour de nous se sont affaissées et laissent la place à d’immenses moutonnements aux allures plus débonnaires. Cet endroit respire la sérénité, l’espace semble s’élargir, sans doute impression due au fait que les montagnes se sont éloignées. Comble du luxe, il est possible de prendre une douche, et les filles vont se faire maquiller à la mode berbère. Ce soir encore au cours du repas ce sont chants et danses endiablées en tapant sur les habituels bidons et gamelles.
Notre guide Ali en bleu
10ème et 11ème jours.
L’étape suivante se déroule dans une vallée qui s’élargit et des reliefs de moins en moins hauts. De grands bouquets de verdure et des villages qui deviennent de véritables villes sont les signes les plus évidents que nous n’allons pas tarder à quitter ces terres hautes de l’Atlas. Encore deux nuits sous tente et l’aventure prendra fin. Je pense que nous aurions aimé que cette aventure continue un peu plus. L’avant dernier soir, un habitant du lieu nous propose sous le manteau un horrible alcool de noix, imbuvable. Un signe de plus nous annonçant la fin imminente du voyage, les téléphones portables passent. Les premiers appels vers les familles ont lieu, le charme va être rompu.
La fin de la dernière étape se déroule le long d’une voie goudronnée. Le bivouac est installé dans un coude de la route. Une belle fête va clôturer ces onze jours à travers le Haut Atlas. Une envie me prend de revenir parcourir les sentiers secrets de ces montagnes. Un projet fabuleux consiste en la traversée totale de la chaîne du Haut Atlas, cela nécessitant à mon avis un mois voire plus. Toute entreprise qui touche à sa fin doit déclencher l’envie de nouvelles aventures, pour éviter le petit coup de blues dû au vide créé par l’accomplissement d’un rêve.
Lucbertrand- responsable de rubrique
- Messages : 559
Date d'inscription : 07/12/2021
Deborah apprécie ce message
Merci
Bonjour et merci pour ce vieux carnet remis à jour .
Je n'ai plus suffisamment la forme pour faire ce genre de tourisme, mais çà me fait vraiment plaisir de découvrir cette traversée à pied de Tabant à la vallée des roses . J'ai fait dernièrement ce trajet, mais en voiture car il y a désormais une route-piste carossable, mais ce n'est pas pareil bien sûr .
Je n'ai plus suffisamment la forme pour faire ce genre de tourisme, mais çà me fait vraiment plaisir de découvrir cette traversée à pied de Tabant à la vallée des roses . J'ai fait dernièrement ce trajet, mais en voiture car il y a désormais une route-piste carossable, mais ce n'est pas pareil bien sûr .
Darzel- responsable de rubrique
- Messages : 412
Date d'inscription : 26/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
merci pour ce récit, c'est vraiment aventureux ! Ces strates dans le relief sont très étranges et les rares arbres torturés qui y survivent semblent si esseulés...
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Bonjour Dominique,
eh oui souvenirs, souvenirs. J'ai la chance d'avoir encore la frite, mais comme pour tout le monde ça baisse avec l'âge. Je croise les doigts. Mon père a effectué des grandes bambées journalières à ski de fond jusqu'à 77 ans. J'espère que la génétique parlera. J'ai un copin, qui à 74 ans, a effectué au printemps 2022 un parcours de 450 km à vélo en 24 heures, et au mois de mars cela signifie la moitié de nuit.
Concernant la piste de la vallée des Roses, j'en ai entendu parler du côté de la vallée des Roses jusqu'au derniers villages.
Mais les gorges, la piste les passe comment?
Et puis du côté Tabant 1850 m d'altitude jusqu'au col , 3300 m si ma mémoire ne me trahit pas, ça fait un sacré chantier. De plus de ce côté il n'y a pas de village à désenclaver. Evidemment toute population aspire au désenclavement, le 4X4 c'est plus rapide et plus pratique que le mulet.
eh oui souvenirs, souvenirs. J'ai la chance d'avoir encore la frite, mais comme pour tout le monde ça baisse avec l'âge. Je croise les doigts. Mon père a effectué des grandes bambées journalières à ski de fond jusqu'à 77 ans. J'espère que la génétique parlera. J'ai un copin, qui à 74 ans, a effectué au printemps 2022 un parcours de 450 km à vélo en 24 heures, et au mois de mars cela signifie la moitié de nuit.
Concernant la piste de la vallée des Roses, j'en ai entendu parler du côté de la vallée des Roses jusqu'au derniers villages.
Mais les gorges, la piste les passe comment?
Et puis du côté Tabant 1850 m d'altitude jusqu'au col , 3300 m si ma mémoire ne me trahit pas, ça fait un sacré chantier. De plus de ce côté il n'y a pas de village à désenclaver. Evidemment toute population aspire au désenclavement, le 4X4 c'est plus rapide et plus pratique que le mulet.
Lucbertrand- responsable de rubrique
- Messages : 559
Date d'inscription : 07/12/2021
La route R317
Bonjour,
J'ai pris la R317 dernièrement . Elle ne passe pas par les gorges bien sûr . Je viens de ré-acheter la célèbre carte 742 de Michelin, et , chose incroyable , la route y figure . La route passe 2 cols : le Tizi n'Aït Imi à 2910 mètres puis descente dans une vallée centrale avec de nombreux villages qu'on aperçoit d'en haut . Elle désenclave bien cette vallée , aussi bien vers le Nord que vers le Sud . Ensuite, le second col est le Tizi n'Aït Hamed, indiqué à 3050 mètres chez Michelin ( mais 3005 mètres sur le panneau installé au col) . Après c'est la descente ver El Kelaa . Je n'y ai vu aucun touriste lorsque je l'ai faite, sauf un petit groupe de motard . 1 véhicule à l'heure .
Bonne journée
J'ai pris la R317 dernièrement . Elle ne passe pas par les gorges bien sûr . Je viens de ré-acheter la célèbre carte 742 de Michelin, et , chose incroyable , la route y figure . La route passe 2 cols : le Tizi n'Aït Imi à 2910 mètres puis descente dans une vallée centrale avec de nombreux villages qu'on aperçoit d'en haut . Elle désenclave bien cette vallée , aussi bien vers le Nord que vers le Sud . Ensuite, le second col est le Tizi n'Aït Hamed, indiqué à 3050 mètres chez Michelin ( mais 3005 mètres sur le panneau installé au col) . Après c'est la descente ver El Kelaa . Je n'y ai vu aucun touriste lorsque je l'ai faite, sauf un petit groupe de motard . 1 véhicule à l'heure .
Bonne journée
Darzel- responsable de rubrique
- Messages : 412
Date d'inscription : 26/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
@Darzel
Bonjour Dominique ,
C’est un miracle , Michelin a enfin investi pour remettre ses cartes à jour .
Merci pour la bonne nouvelle .
Bonjour Dominique ,
C’est un miracle , Michelin a enfin investi pour remettre ses cartes à jour .
Merci pour la bonne nouvelle .
Hannah- modérateur
- Messages : 2505
Date d'inscription : 08/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Bonjour!Lucbertrand a écrit:Concernant la piste de la vallée des Roses, j'en ai entendu parler du côté de la vallée des Roses jusqu'au derniers villages.
Une description récente et détaillée de la 317 "Trans Tmazirte" ICI
AJFT- Messages : 1328
Date d'inscription : 20/01/2022
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Joli récit d'une randonnée hyper-classique accompagnée de jolies photos. Quelques remarques toutefois :
- ces arbres que vous appelez thuyas sont des genèvriers thurifaires (thurifaire évoque l'encens, non il n'y en a pas mais c'est à cause de l'odeur dégagée par ces arbres qu'on l'a ainsi dénommé)
- les portugais ont effectiveement mis les pieds au Maroc (ils ont fondé les comptoirs d' Essaouira et d'el Jadida entre autres) mais ils n'ont jamais fait la moindre incursion vers l'intérieur du pays. Mais, Dieu sait pourquoi, les berbères attribuent aux Portugais toute construction dont ils ignorent l'origine.
- votre guide ignorait ces détails, de même qu'il se déguise en Touareg (voiles bleus), lesquels n'ont jamais mis les pieds au Maroc ! ces gens-là vivent plus à l'est et plus au sud, aux confins de la Lybie et du sud algérien, au Niger ou au Mali. D'ailleurs avez vous rencontré un autre berbère tout de bleu vêtu ?
Tout cela n'empêche pas que le maroc soit un pays fantatsique avec des gens fort sympathiques et attentionnés, et qu'on ne s'en lasse jamais.
- ces arbres que vous appelez thuyas sont des genèvriers thurifaires (thurifaire évoque l'encens, non il n'y en a pas mais c'est à cause de l'odeur dégagée par ces arbres qu'on l'a ainsi dénommé)
- les portugais ont effectiveement mis les pieds au Maroc (ils ont fondé les comptoirs d' Essaouira et d'el Jadida entre autres) mais ils n'ont jamais fait la moindre incursion vers l'intérieur du pays. Mais, Dieu sait pourquoi, les berbères attribuent aux Portugais toute construction dont ils ignorent l'origine.
- votre guide ignorait ces détails, de même qu'il se déguise en Touareg (voiles bleus), lesquels n'ont jamais mis les pieds au Maroc ! ces gens-là vivent plus à l'est et plus au sud, aux confins de la Lybie et du sud algérien, au Niger ou au Mali. D'ailleurs avez vous rencontré un autre berbère tout de bleu vêtu ?
Tout cela n'empêche pas que le maroc soit un pays fantatsique avec des gens fort sympathiques et attentionnés, et qu'on ne s'en lasse jamais.
chiba31- Messages : 108
Date d'inscription : 08/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Bonsoir Philippe, je vois que j'ai à faire à un connaisseur du pays. Merci pour ces réctifications, au moins vous avez lu le texte, long sans doute trop long.
Je me demandais ce qui pouvait avoir amené les Portugais à se "planquer" en un tel endroit au milieu de falaises. Vous levez mes interrogations, ils n'y sont jamais venus.
Effectivement, je n'ai pas vu d'autres hommes bleus.
Ali nous a pris pour les touristes que nous étions, rien de surprenant.
J'ai vu que vous étiez allé dans l'Atacama et le nord Argentine, des coins que j'affectionne particulièrement, où j'ai passé plusieurs mois dans de grandes traversées à vélo, par les grands cols comme le Paso Sico ou le San Francisco et une traversée d'Arica à Santiago par les salars de Coipasa et Uyuni et aussi en traversant le Sud Lipez, des coins ensorcelants.
Merci pour ces précisions
Luc
Vers la frontière chilienne avant d'attaquer le sud Lipez
Face à la Laguna Colorada
Bivouac à Sol de Mañana
Lucbertrand- responsable de rubrique
- Messages : 559
Date d'inscription : 07/12/2021
Re: Balade à pied de 11 jours dans le Haut Atlas
Chiba a écrit:les portugais ont effectiveement mis les pieds au Maroc (ils ont fondé les comptoirs d' Essaouira et d'el Jadida entre autres) mais ils n'ont jamais fait la moindre incursion vers l'intérieur du pays.
Bonjour !LucBertrand a écrit:Je me demandais ce qui pouvait avoir amené les Portugais à se "planquer" en un tel endroit au milieu de falaises. Vous levez mes interrogations, ils n'y sont jamais venus.
Eh bien, si ! Car il y a Portugais et Portugais.
D'une part les Portugais conquérants des cités côtières, qui ne se sont guère aventurés dans les terres, et en tout cas pas dans l'Atlas et le sud-est, et les autres.
Les autres ? Les captifs, et surtout les renégats, très nombreux particulièrement à l'époque saâdienne. Ils avaient souvent un rôle de "coopérants techniques" dans différents domaines, course, armement, architecture. Entre autres, et c'est ce qui nous concerne, dans la recherche minière. Ils faisaient donc des trous dans les montagnes.
Voilà pourquoi, de nos jours, tout trou un peu bizarre, dont l'historique s'est perdu, c'est "Bortqiz".
Lorsque j'étais enseignant à Boumalne du Dadès dans les années 70 j'ai eu l'occasion de voir un graffiti en portugais au fond d'une ancienne galerie de la mine d'argent d'Imiter, à l'ouest de Tineghir.
Je suis actuellement en vacances en Corse, mais lorsque j'aurai regagné Goulmima et ma bibliothèque j'essaierai de retrouver des exemples probants dans :
La Bataille des trois rois, de Younes Nekrouf et “Fables de la mémoire; La glorieuse bataille des Trois Rois (1578)”, de Lucette Valensi. Les Chrétiens d'Allah parlent aussi des "Soldats perdus de l'armée de Don Sébastien".
Ceci étant, il va sans dire que les greniers troglodytes et autres trous dans les falaises n'ont rien de "portugais", mais les migrations de tribus au XVIIè en ont fait oublier l'origine berbère. On se souvient juste de cette vieille histoire de "Português" à la prononciation si proche du "Bortqiz" berbère.
AJFT- Messages : 1328
Date d'inscription : 20/01/2022
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