[moto] courses de CHIMAY 23 et 24 juillet 2022
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[moto] courses de CHIMAY 23 et 24 juillet 2022
par Lucbertrand Ven 29 Juil 2022 - 19:31
Dans notre période de dérèglement climatique certaines activités peuvent être critiquées, mais malgré la culpabilité qui rôde un peu la passion reste la plus forte. Mais pour combien de temps encore?
CHIMAY 23, 24 Juillet 2022
C'est la machine de la femme qui a fait la démonstration en statique
Motos accidentées ou en panne ramenées dans les intercourses
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CHIMAY 23, 24 Juillet 2022
Petite ville de Belgique, Chimay est connue pour ses bières qui, pour certaines d’entre elles, peuvent être redoutablement chargées en alcool. Cependant, même si j’aime la bière, je n'y suis pas allé pour la tester dans toutes ses gammes mais pour un tout autre motif, assister à un week-end de courses de motos les 23 et 24 juillet.
A vrai dire, plus que les courses sur circuit, ce sont principalement celles sur route qui m’attirent comme spectateur. Les deux plus prestigieuses sont les 300 virages à Horice en Tchéquie et surtout le mythique Tourist Trophy sur l’île de Man, la course la plus difficile mais aussi la plus dangereuse au monde.
Le circuit de Chimay n’est plus tout à fait une course sur route contrairement aux deux que je viens de citer. Elle se déroule bien sur des tronçons de routes utilisées par les usagers en dehors des compétitions, mais l’aspect général du tracé ressemble beaucoup à un circuit. Route large, hors agglomération, protection par des rails de sécurité adaptés aux motos, par endroits même espaces de dégagement, tout cela renforce la ressemblance avec un circuit classique. Les 300 virages et le Tourist Trophy se déroulent sur de petites routes en terrain accidenté, et les parcours traversent des villages.
Cependant, si l’esprit course sur route n’est pas caractérisé, cette manifestation a représenté un très beau moment, malgré des journées caniculaires.
Le circuit est court, de l’ordre de 4 kilomètres, surtout constitué de longues lignes droites sur un terrain plat. On est loin des 60 kilomètres de la boucle du Tourist Trophy en zone montagneuse. Cette faible distance présente un avantage certain, les motos passent à une fréquence en continu. La route qui se faufile en forêt et qui tient lieu de circuit à Horice, est à peine plus longue, un peu plus de 5 kilomètres et offre aussi un spectacle soutenu. Elle présente une belle caractéristique, elle ondule à la manière d’un serpent, frissons assurés.
Une course de motos c’est un peu la prière du motard. On se rend à la messe dans le temple de la vitesse. Les spectateurs sont en bonne partie des vieux motocyclistes qui ont passé la soixantaine et qui pratiquent ce sport depuis bien longtemps. La moyenne d’âge élevée explique peut-être cette ambiance calme et décontractée où, malgré la présence de nombreux points de vente de bière, on ne voit jamais personne en excès de boisson sur le bord du circuit.
Et puis l’admiration, même l’adoration, le mot n’est pas trop fort, jouent à fond devant la technique. Ces machines sont de véritables petits bijoux de précision et de complexité. Il faut résoudre l’équation subtile entre poids et puissance. De plus, ce qui ne gâche rien, elles sont d’un esthétisme redoutable, aussi bien dans les formes que dans les couleurs, de vraies œuvres d’art. Bien évidemment le bruit des échappements est un autre élément envoûtant et indispensable de la fête.
Comme en Formule1, l’électricité fait aussi son chemin en matière de deux-roues. Dans certaines compétitions, des épreuves de motos électriques sont au programme. Elles n’ont pas un franc succès car il y manque le bruit rageur des moteurs en surrégime au moment des accélérations, des décélérations et des passages à plus de 300 km/h en ligne droite.
Pour assouvir notre très ancienne passion avec un copain de plus de 50 ans d’amitié, nous nous retrouvons chaque année au bord d’un circuit, ici ou ailleurs.
Cette fois-ci, nous nous étions donné rendez-vous le vendredi à Rance, petite commune située à une dizaine de kilomètres du circuit. Mon camarade avait réservé pas mal de temps à l’avance dans un gîte. L’accueil y fut excellent. L’hôtesse, très prolixe sur sa région, était d’une conversation très agréable. De plus ses confitures maison étaient délicieuses, les fruits bien conservés en morceaux, les saveurs merveilleusement présentes, pas comme ces marmelades sucrées au goût indéterminé. Nous avons comparé nos recettes, comme elle je suis un adepte inconditionnel de la confiture mono-fruit. C’est au cours d’une telle discussion que l’on réalise qu’une excellente confiture nécessite une bonne recette, des dosages appropriés et un temps de cuisson adapté pas toujours facile à apprécier. Et puis un dernier détail, ne pas en faire trop dans un même récipient, 3 kilos plus 1,5 kilo de sucre, autrement l’appréciation du temps de cuisson s’apparentera à la quadrature du cercle avec le risque de se retrouver à chanter la chanson : la confiture ça dégouline, ça coule par les trous de la tartine…
Le samedi s’annonçait dense. Il était surtout consacré aux séances d’essai qui débutèrent dès 08h00 du matin. Ils n’ont pas la même intensité que la course elle-même. Ils sont très importants, d’abord pour la qualification aux courses et puis pour la place sur la ligne de départ.
Des séries de 20 minutes espacées chacune de 10 minutes. Pas de répit pour les rois et les reines du bitume qui allaient devoir s’affronter dans les courses prévues en fin d’après-midi et toute la journée du dimanche. 8 à 10 tours de circuit à parcourir selon les catégories, avec un départ rapproché entre chaque série. En théorie pas le temps de souffler mais, comme toujours, dans ces compétitions les incidents et les accidents entraînent des modifications et parfois de longues attentes.
Les stands sont un point de passage obligatoire. Les équipes sont installées sous des barnums. On y découvre des passionnés de vitesse et de mécanique. Ils n’hésitent pas à vous expliquer les grandeurs et les servitudes de leur passion dévorante. Et ces dernières sont incommensurables, tout particulièrement pour les adeptes du side-car. Ces engins impliquent un entretien ahurissant. La moindre séance d’essai nécessite en retour un démontage complet et des réglages pointus.
La personne dans le « panier » est dénommée le ‘singe’. En aucun cas le terme passager est approprié, car son rôle est très important pour maintenir l’équilibre et la trajectoire de l’engin dans les courbes et, souvent, elles sont engagées à grande vitesse. En effet, une moto penche dans les virages, un side-car non, d’où une force centrifuge importante qu’il faut combattre, tâche principale du coéquipier. Les ‘singes’ sont couramment des femmes et de toute évidence, elles n’ont pas froid aux yeux, prenant les positions les plus exposées et excentrées aux moments cruciaux. Comme les motos, les side-cars vont vite, très vite. En catégorie 600 cc, la vitesse est de 240 km/h et en 1000, elle monte à 290. Toujours un spectacle impressionnant à regarder ces amazones, cheveux flottant au vent, presque à l’équerre, à tirer des bords comme sur un voilier mais à une vitesse bien supérieure et le nez à ras le bitume.
Sous la tyrannie implacable du soleil, les pilotes souffrent, engoncés dans leur combinaison de cuir et leur casque. Tout particulièrement au moment du rassemblement sur l’emplacement dédié avant le début des essais ou de s’aligner sur la piste pour le départ. Sur un morceau de goudron surchauffé, hommes et machines s’entassent et le moindre incident va prolonger cette situation inconfortable. Les équipages doivent avoir une très bonne condition corporelle pour encaisser ces instants qui se transforment en très longues minutes au moment où ils ont besoin de se concentrer, avant des efforts physiques et psychiques intenses. La perte de vigilance se payera cash par un manque de compétitivité ou pire, un accident. Les membres de leur équipe les assistent en déployant des parapluies afin de les maintenir préservés de l’ardeur des rayons d’Hélios.
Le plus étonnant dans ces moments d’attente, les pneus eux doivent continuer à être chauffés pour que la gomme, à la température optimale, morde et s’agrippe à la chaussée dès le premier virage. Alors, outre le porteur de parapluie, le « tireur » de groupe électrogène est à côté. La chaussette qui entoure les pneus fournit la chaleur qui permettra les démarrages en trombe sans risquer la chute au premier virage. Sur une zone réduite s’agglutine donc une foule compacte et nous, les spectateurs, nous nous approchons et les photographions sous tous les angles.
Je regarde un ‘singe’ en pleine concentration. Tête baissée, de son casque sort une longue chevelure blonde. Elle est appuyée à la machine, en pleine concentration. Répète-t-elle mentalement la chorégraphie de sa danse pour contrer les effets de la force centrifuge, au rythme des accélérations et décélérations accompagnées de la furie hurlante des tours moteur qui s’emballent ? Oui, le singe est pratiquement sur les pots d’échappement, il est donc particulièrement exposé à ce déferlement de bruit mais il doit garder toute sa lucidité pour réagir correctement en une fraction de seconde.
Visualiser le circuit, ou anticiper sa position alors qu’il est planqué dans le panier tête baissée pour diminuer la prise au vent. N’oublions pas la très grande vitesse, plus rapide qu’un parachutiste en chute libre. Être au diapason avec le pilote à chaque virage, en fonction de la situation la corde ou l’extérieur. Maîtriser sa peur de la chute. Une erreur de positionnement ou un retard minime de sa part, et le bolide se retrouve en fond de grille ou dans les décors.
Pour les vieux motards que nous sommes, nous retrouvons avec plaisir cette atmosphère de fête de la moto. Nos mémoires depuis si longtemps se souviennent de ce plaisir difficile à décrire, déclenché par le rugissement des moteurs, l’odeur d’huile, d’essence.
C'est la machine de la femme qui a fait la démonstration en statique
Comme toujours, dans ces regroupements de passionnés, l’organisation est remarquable, l’ambiance bon enfant loin des scènes de débordement que l’on observe dans d’autres sports. Une fois de plus, l’amabilité des pilotes et de mécaniciens dans les stands n’a pas été démentie.
Une femme ‘singe’ nous a expliqué longuement son job, en prenant la pose dans le panier selon les virages à droite ou à gauche ou lors des grandes vitesses en ligne droite. Elle a à sa disposition plusieurs poignées qui lui permettent les positions les plus folles en se penchant jusqu’à frotter le bitume. On réalise qu’une mauvaise prise en main d’une poignée et c’est le drame de l’éjection à haute vitesse.
Motos accidentées ou en panne ramenées dans les intercourses
Sous une tente, le mécanicien nous parle doucement car derrière la moto qu’il vient de régler, le pilote à même le sol dort à poings fermés, rechargeant les batteries un peu avant la course.
A aucun moment, la belle affluence n’a pas été ressentie comme une menace. Les baraques à frites, Belgique oblige, attiraient une foule dense, disciplinée et patiente qui s’étirait en une queue compacte.
Même les pissotières mobiles sont organisées au mieux. C’est la première fois que j’en vois de ce type. La propreté du site est aussi à remarquer, quasiment pas de papiers ni cannettes qui traînent, un dispositif de sac poubelle bien organisé et bien utilisé n’appelle aucune remarque. D’ailleurs, dans les intercourses, des engins munis de benne font la tournée des poubelles pour éviter que les déchets débordants ne s’empilent.
Durant deux jours, les tours vont s’enchaîner. Les départs de course sont particulièrement spectaculaires. Les motos arrivent en paquet serré dans un bruit assourdissant et se jettent dans le premier virage, avant de s’étirer en un long ruban multicolore. Chaque course est un ballet aux mouvements millimétrés entre l’homme ou l’équipage et sa machine.
Pour profiter pleinement du spectacle, il faut trouver une place stratégique. Pour cela, nous nous déplaçons d’une petite butte qui permet une vue large à un virage particulier qui offre le spectacle des motos qui penchent à l’extrême limite de l’adhérence, ou encore en nous positionnant au milieu d’une ligne droite où la vitesse frise les 300 km/h, voire la dépasse pour les plus intrépides.
D’autres spectateurs préfèrent rester statiques. Ils s’installent confortablement en famille, assis sur des fauteuils pliants, sans avoir oublié le parasol et la glacière.
Pour tout cet ensemble, les courses de motos me fascinent, mélange de souvenirs déraisonnables de jeunesse où l’on se croyait immortel malgré les copains qui se tuaient et de contacts humains et de discussions avec des fous et des folles complètement dévorés par leur passion, certes un peu dangereuse. Une foule qui vient assister et communier à la grand-messe de la Déesse Vitesse. Mais la vie n’a-t-elle pas que plus de valeur lorsqu’on a eu peur de la perdre à maintes occasions ?
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Dernière édition par Lucbertrand le Sam 30 Juil 2022 - 12:03, édité 4 fois
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